Entrez dans la transe

Filmé par David laChapelle, The Rize est un voyage éblouissant au cœur du krump, une danse-transe électrisante issue du hip-hop et née dans le ghetto de Los Angeles.

Rien ne prédisposait David laChapelle, photographe blanc de la jet-set et réalisateur de clips branchés à poser sa caméra à South Central, l’un des quartiers noirs les plus durs de L.A. Mais quand il y découvre le krump, une danse de rue frénétique et saccadée il est ébloui.
"Je n'en ai pas cru mes yeux et j’ai décidé de faire un film : il fallait que garde une trace de ce phénomène", explique-t-il. Le krump devient ainsi le sujet d’un documentaire de 85 minutes qui le mobilisera durant trois ans et qu’il financera lui-même à hauteur de 700 000 dollars.
Il fut présenté à Deauville en 2005 où il accède à la notoriété après être apparu dans les clips de Christina Aguilera ou Prodigy.
Le documentaire suit la vie du créateur du krump, Tommy le Clown, et retranscrit l'ambiance survoltée du tournoi où s'affrontent les danseurs …

Tommy le clown aka Thomas Jonhson est à l’origine de cette discipline. Au lendemain des émeutes raciales consécutives à l'affaire Rodney King en 1992 à Los Angeles, cet ancien dealer décide d’offrir un peu de soleil aux gamins des cités. Déguisé en clown, avec grimage blanc et perruque arc-en-ciel, il invente le "clowning", un dérivé souriant du hip-hop, et entraîne les enfants dans la danse.
Il sera suivi des dizaines d’émules. "J’étais loin d’imaginer que le clowning prendrait une telle ampleur et deviendrait un véritable phénomène de société qui dépasserait les frontières de South Central", lâche Tommy. Certains parmi ses adeptes en développent bientôt une variante plus radicale, plus rageuse et moins "clownesque" : ainsi naît le krump, sorte de danse tribale électrique et instinctive, exécutée sur un tempo ultrarapide. Un exutoire à travers lequel ses pratiquants laissent s’exprimer toute leur agressivité, lors de pacifiques affrontements sur scène. "Dans ces quartiers défavorisés, les jeunes n’ont aucunes perspective d’avenir et finissent tous par rejoindre un gang, raconte LaChapelle. Pour eux la danse est une solution, une manière de donner libre cours à leur vitalité, de gagner le respect." Inscrit dans la réalité sociale abrupte, son film est aussi, plastiquement, une vraie réussite. Sobre dans sa mise en scène, "Rize" laisse toute la place à l’expression des corps athlétiques et des couleurs éclatantes des ciels bleu vif, des vêtements flashy et des maquillages arborés par les danseurs. Un film bluffant, qui communique une énergie rare.

Cette danse, non-violente malgré ses apparats d'agressivité, se veut également une danse tolérante où hommes, femmes, obèses et enfants sont considérés sur un pied d'égalité, en contre-pied de l'univers sexiste et violent du hip-hop gangsta. Cette danse urbaine, drôle, brutale et fascinante présente plusieurs points communs avec les danses rituelles et tribales d'Afrique.

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